Le législateur a introduit au cours des dernières années plusieurs réformes en faveur de la dématérialisation de la vie sociale des sociétés. L’introduction récente de la faculté de dématérialiser les procès-verbaux et registres de décisions d’associés (décret n° 2019-1118 du 31 octobre 2019) est l’occasion de faire le point sur les dispositions incitant les chefs d’entreprise à passer au numérique pour la gestion de la vie sociale des sociétés.
Ceci est particulièrement d’actualité au regard des contingences crées par la pandémie de Covid- 19.
Indépendamment des mesures d’urgence qui devraient être prises par voie d’ordonnance pour l’exercice en cours, le Code de commerce a été modifié récemment pour favoriser la dématérialisation de la tenue des assemblées générales.
Ainsi, les sociétés à responsabilité limitée (C. com. L. 223-27), sociétés anonymes non cotées (C. com. L. 225-103-1) et sociétés par actions simplifiée (C. com. L. 227-9) peuvent réunir associés ou actionnaires par visioconférence ou par des moyens de télécommunication permettant leur identification.
C’est également possible dans les sociétés en commandite par actions non cotées, par renvoi de l’article L. 226-1 aux dispositions applicables à la société anonyme.
Les textes applicables aux sociétés en nom collectif et aux sociétés en commandite simple ne précisent pas s’il est possible ou non de recourir à la visioconférence pour les assemblées générales. Ces sociétés peuvent néanmoins recourir à la consultation écrite des associés, et nous verrons dans la seconde partie de cet article le parti à tirer de cette faculté dans le cadre de la dématérialisation des procès-verbaux.
L’organisation d’assemblées générales dématérialisées ne peut néanmoins se réaliser librement et doit impérativement respecter certaines conditions (C. com. R. 225-97, R. 225-98 et R. 225-61 pour les SA et SCA, R. 223-20-1 pour les SARL) :
Pour tenir compte de la situation crée par l’apparition du Covid 19, une évolution des textes concernant les sociétés cotées est à l’étude à ce jour. La loi d’urgence votée par le parlement le 22 mars 2020 autorise, en effet, le gouvernement à adopter des mesures exceptionnelles afin d’assouplir les règles strictes du droit des sociétés de manière à respecter les règles de confinement. A l’heure de la rédaction de cet article, ces ordonnances ne sont pas encore parues mais l’on sait déjà qu’elles concerneront la possibilité de tenir des assemblées générales virtualisées sans avoir besoin de modifier préalablement les statuts ainsi que la possibilité également de s’exonérer de l’obligation de réunion physique des conseils d’administration ou des conseils de surveillance d’arrêtés des comptes.
Avant le décret n° 2019-1118 du 31 octobre 2019 il était nécessaire de conserver la plupart des procès-verbaux sur des supports papiers. Dorénavant, leur dématérialisation est permise pour les documents suivants :
En l’absence de précision des textes, ces dispositions semblent pouvoir être étendues aux décisions des associés de SNC, de SCS et de SARL résultant d’un acte.
Les différents articles applicables issus du décret du 31 octobre 2019 précisent que pour être considérés comme étant établis sous forme électronique, les procès-verbaux devront être signés au moyen d’une signature électronique qui devra respecter au moins les exigences relatives à une signature électronique dite « avancée » prévue par l’article 26 du règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur.
La signature avancée doit ainsi remplir les conditions suivantes :
Les documents dématérialisés doivent également être datés de façon électronique au moyen d’un horodatage offrant toute garantie de preuve (R 225-20, R 225-22, R 225-47, R 225-49, R 225-106 et R. 227-1-1).
Enfin, il faut relever que cette possibilité de dématérialisation des registres ou des procès-verbaux ne sera possible que si les statuts de la société ne prévoient pas expressément leur tenue sous format papier. Si tel est le cas il faudra préalablement modifier les statuts sur ce point.
En fonction de la forme sociale, une variété plus ou moins importante d’actions peuvent être mises en œuvre pour dématérialiser et « virtualiser » la vie juridique de la société.
Dans les sociétés par actions, l’usage de la visioconférence ou de la conférence téléphonique, associée à un système de vote électronique via un site web, procure une plus grande flexibilité pour réunir les actionnaires, mais aussi les organes de direction ou de surveillance en leur évitant d’être présents sans pour autant être représentés ou physiquement sur place.
La tenue dématérialisée des procès-verbaux permettra un gain de temps et de place car il ne sera plus nécessaire de conserver et de tenir à jour les encombrants registres des décisions des assemblées générales, du conseil d’administration ou du conseil de surveillance.
Compte tenu des progrès réalisés par le droit français en matière de dématérialisation des documents juridiques, il est aujourd’hui tout-à-fait envisageable de mettre en place un système permettant la dématérialisation de la vie contractuelle et de la vie juridique des sociétés.
A cette fin, et en dehors des mesures exceptionnelles qui sont attendues pour les assemblées devant se réunir pendant la période de confinement actuellement en cours, plusieurs actions juridiques préalables seront utiles à mener :