La jurisprudence très récente de la Cour de cassation donne des éclairages particuliers concernant des cas de mise en jeu de responsabilité des dirigeants sociaux : l’un dans le cadre d’un LBO, l’autre pour des faits commis postérieurement au remplacement du gérant.
Société rachetée en LBO : condamnation des dirigeants à combler le passif pour fautes de gestion
(Cass. Com. 09/09/2020 n° 18-12444)
Une société rachetée par un fonds d’investissement via une holding créée pour cette opération dans le cadre d’une opération avec effet de levier de LBO, est placée en en liquidation judiciaire. Le liquidateur poursuit les dirigeants de la société en responsabilité pour insuffisance d’actif, sur le fondement de l’article L. 651-2 du Code de commerce.
Les fautes de gestion suivantes leur sont reprochées :
Les dirigeants font valoir les arguments suivants :
La Cour rejette les arguments des dirigeants, aux motifs suivants :
Certains des dirigeants mis en cause font valoir qu’ils ne sont pas responsables du soutien financier abusif accordé à la filiale. En effet, selon leurs arguments, les décisions relatives à la filiale ont été prises au sein d’un organe collégial (comité de direction) auxquels ils ne participaient pas.
La Cour rappelle tout d’abord que les dirigeants mis en cause faisaient partie du conseil d’administration de la holding, lequel était parfaitement au courant de l’existence de la filiale et des difficultés financières qu’elle rencontrait. Ces pertes ayant été intégralement supportées par la société mise en liquidation judiciaire par le biais d’avances en compte-courant, le soutien financier apporté à la filiale a contribué directement à l’aggravation de l’insuffisance d’actif. La Cour relève enfin le manque de vigilance des administrateurs de la holding.
Cette solution est conforme à la jurisprudence habituelle de la Cour, qui considère que les dirigeants, même simples administrateurs, ne peuvent ignorer l’importance des pertes générées par le soutien aux filiales du groupe (voir par exemple Cass. Com. 28/11/2000 n° 97-15985). Cela illustre le devoir de vigilance des représentants légaux.
Cet arrêt est toutefois de nature a créer de nombreuses inquiétudes en matière de distribution de dividendes dans le cadre de contexte financier tendu. Il est alors prudent de pouvoir justifier de plan d’affaires prévisionnels crédibles et démontrant que la distribution de dividendes ne présente pas de risque par rapport aux projections financières réalisées.
Condamnation pénale d’un gérant de SARL pour des faits postérieurs à la cessation de ses fonctions
( Cass. Crim. 09/09/2020 n° 19-81118 )
Une gérante de SARL met fin à ses fonctions et est remplacée dans le cadre d’une assemblée générale du 2 avril 2011. La publication légale de la cessation de ses fonctions est effectuée un peu plus d’un an plus tard.
L’ex-gérante, condamnée pour des infractions relatives aux fonctionnement de la société (abus de biens sociaux, travail dissimulé, etc.) fait valoir, sans succès, que les faits commis après sa cessation de fonctions ne peuvent entraîner sa condamnation.
La Cour rejette les arguments de la gérante pour les raisons suivantes :
En conséquence, la Cour valide la condamnation pénale de l’ex-gérante.
Cette décision met en lumière l’importance de réaliser rapidement les formalités de mise à jour du Kbis après la démission d’un représentant légal.